Je venais de passer une longue heure à écouter les paroles si ennuyeuses qu'avaient prononcé mon professeur de mathématiques. C'était sans dissimuler une joie certaine que j'avais quitté mes cours pour me diriger vers la cantine du lycée. Je savais pertinemment que je n'avalerais rien, et que mon estomac resterait une nouvelle fois vide, mais cela m'importait peu. Je ne serais jamais pleinement rassasiée, j'en avais la certitude. La seule chose qui aurait pu combler ce vide qui contrôlait mon esprit était innaprochable, trop lointaine. La chasse me hantait. Mais j'avais conscience que pour atteindre mon but -qui consistait à manipuler les esprits comme j'avais l'habitude de faire pour arriver à mes fins- je devais me priver de sang, du moins, de celui de Forks.
Je fis quelques pas en direction du bâtiment où j'allais bientôt passer une nouvelle heure ennuyante, assise sur une chaise, placée telle un pion l'aurait été. Pourtant, l'odeur si ennivrante du sang trônait dans la pièce, comme à chaque fois que j'y posais la pied. J'avais souvent crains d'y perdre conscience, ou pire, de me laisser envahir par une faim incontrôlable, ce qui m'aurait amenée vers un échec impardonnable. Il fallait que je tienne, c'était ce que les miens souhaitaient. Alors certes, résister à l'envie de se nourrir était l'épreuve la plus dure à laquelle je n'avais jamais été confrontée, mais j'étais possédée par une volonté féroce d'attendre encore. Attendre, inexorablement, inlassablement, sans fin. Bientôt, je partirais chasser loin de Forks pour récupérer des forces, dont je manquais cruellement. Il me fallait donc patienter.
J'avançai encore, jusqu'à me trouver au seuil de la porte du bâtiment. Dans un soupir, je la poussai et se retrouvai rapidement à l'intérieur, bercée par cette odeur si prenante, odeur d'une proie sans aucune défense qui ne pourrait s'échapper avec l'habilité nécessaire. J'étais un vampire, doté d'une vitesse exceptionnelle, ce qui m'avait été utile à maintes et maintes reprises. A présent, capturer mon "repas" n'était plus une chose que je considérais comme amusante. Je finissais même par me lasser de la naïveté des humains, que je pensais bien inférieurs à moi.
Je passai ma carte de cantine dans la machine prévue à cet effet, et m'emparai d'un plateau que je pris soin de remplir avec toutes sortes d'aliments que je n'observai qu'une seconde puis me dirigeai vers la table où j'avais l'habitude de prendre place.